Courchevel

Courchevel, ensemble de villages perchés entre 1 300 et 1 850 mètres d'altitude dans la vallée de la Tarentaise, en Savoie, réunit une population alpine d'à peine deux mille habitants permanents et un domaine skiable de quelque 605 hectares au sein du plus grand domaine skiable relié au monde, Les Trois Vallées. Située en région Auvergne-Rhône-Alpes, la station attire une clientèle essentiellement internationale avec ses 493 kilomètres de pistes interconnectées, sa piste d'altiport abrupte et sa concentration de palaces de luxe et de restaurants étoilés. Sous son apparence exclusive se cache une histoire de planification délibérée d'après-guerre, des infrastructures de calibre olympique et un profil en constante évolution qui englobe désormais des festivals artistiques d'été et une gestion environnementale responsable aux portes du parc national de la Vanoise.

Depuis les premières études sur le régime de Vichy en 1942 jusqu'à la vision de Laurent Chappis, inspirée par son doctorat, Courchevel s'est imposée comme la première station de montagne française entièrement construite sur mesure. Chappis, aux côtés de l'ingénieur Maurice Michaud, a décidé d'abandonner le modèle d'adaptation des villages existants et d'établir un réseau de sites à 1 300 (Le Praz), 1 550 (aujourd'hui Courchevel Village), 1 650 (Moriond) et 1 850 mètres d'altitude – aujourd'hui simplement « Courchevel » – chacun doté d'un caractère distinct. Inauguré en 1946, Courchevel 1550 a servi de base initiale aux infrastructures touristiques, son hameau primitif donnant naissance à des hôtels comme le Roc Merlet. Deux ans plus tard, Chappis supervise l'aménagement de Courchevel 1850 sur le large alpage de Tovet, ses façades anguleuses et ses toits à faible pente révolutionnant l'architecture alpine et lui valant, en 1998, une inscription à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques pour l'ensemble urbain.

La croissance rapide de Courchevel dans les années 1950 et 1960 reflétait l'engouement de la France pour les sports d'hiver comme loisirs de masse. Pourtant, la station conservait un lien social ancré au Praz et à Saint-Bon-Tarentaise, chef-lieu de la commune, à 1 100 mètres d'altitude, où des navettes gratuites relient les maisons traditionnelles en pierre et l'église Saint-Bon du XIIe siècle à la limite des neiges. En 1952, le « Balcon ensoleillé » de Moriond avait acquis son surnom non seulement pour ses pistes ensoleillées, mais aussi pour un domaine skiable autonome géré par la Société des Téléskis de Moriond, ancêtre de la Société des Trois Vallées (S3V), créée en 1946 et aujourd'hui chargée des remontées mécaniques des Trois Vallées. Un décret de 1959 unifia le territoire de Moriond au sein de la juridiction de Saint-Bon, consolidant ainsi la gouvernance locale, alors même que les agences nationales allaient bientôt investir dans les sites olympiques.

L'inauguration des tremplins de saut à ski du Tremplin du Praz en janvier 1991 préfigurait les Jeux olympiques d'hiver d'Albertville de 1992, où Le Praz accueillait le saut à ski et le combiné nordique, et La Tania, construite spécialement pour les compétiteurs, rejoignait la mosaïque de la vallée. La patinoire locale du Forum, ouverte en décembre 1990 pour un coût de 38 millions de francs, offrait des installations d'entraînement avant la répartition des épreuves entre Albertville, Méribel et Pralognan-la-Vanoise. La piste de l'altiport, initialement créée par Michel Ziegler en 1961, puis agrandie pour accueillir les avions Dash 7 des Jeux, soulignait l'importance stratégique de Courchevel malgré sa célèbre pente raide de 18,5 % et ses 525 mètres de long. Les pilotes doivent posséder une certification spéciale pour naviguer dans la vallée, et l'aéroport reste classé parmi les plus dangereux au monde.

L'expansion de la station au XXIe siècle a allié opulence et sophistication opérationnelle. En 2011, la classification hôtelière française a introduit une sixième étoile « palace » ; Courchevel a obtenu deux des huit premiers palaces du pays dans le Jardin Alpin. Quatorze hôtels de la station sont désormais classés cinq étoiles, et sept établissements sont étoilés au guide Michelin : Le Chabichou, parmi eux, avec deux étoiles, et le Cheval Blanc de Yannick Alléno, avec trois étoiles. Aux côtés des boutiques de couture Louis Vuitton, Hermès, Chanel et autres, la station propose ce qui a été décrit comme la pharmacie la plus chère de France. Sa clientèle est principalement issue des pays du Golfe et des milieux russes aisés, qui programment leurs visites pour coïncider avec le Nouvel An et le Noël orthodoxe russe, le 7 janvier, faisant de la première quinzaine du mois la haute saison.

Pourtant, le luxe coexiste avec des défis qui mettent à l'épreuve la résilience de la communauté. Le 20 janvier 2019, à l'aube, un incendie a ravagé les logements des travailleurs saisonniers de Courchevel 1850, faisant deux morts et vingt-deux blessés. Cent trente pompiers sont intervenus, leur rapidité d'intervention ayant permis d'éviter une tragédie encore plus grave et de mettre en évidence la faible marge d'erreur possible au milieu des rues escarpées et des façades de chalets serrées. Cet incident a entraîné un renforcement des protocoles de sécurité dans les logements ouvriers et un renouvellement des investissements dans les services d'incendie communaux.

L'engagement de Courchevel en faveur d'une vitalité permanente s'est traduit par l'ajout de grands espaces de loisirs et culturels. Décembre 2015 a marqué l'ouverture d'Aquamotion, un complexe aquatique de 15 000 m² comprenant piscines intérieure et extérieure, plongeoirs, toboggans, spa et trois restaurants, tous conçus pour diversifier l'offre après-ski. En novembre 2013, le centre sportif L'Envolée au Praz a offert un gymnase de 1 000 m², une zone de fitness et une salle polyvalente, accueillant aussi bien les athlètes de haut niveau que les visiteurs occasionnels. Actuellement en construction au Praz, L'Alpinium vise à améliorer les liaisons avec Courchevel 1850 et à agrandir le parking, reconnaissant ainsi l'importance cruciale d'une meilleure mobilité inter-villages dans une station qui s'étend sur cinq villages tout en portant le nom de son point culminant.

La désignation de Courchevel et Méribel comme co-organisateurs des Championnats du monde de ski alpin FIS 2023 a réaffirmé le prestige international de la vallée. Les courses ont débuté sur le tout nouveau parcours de l'Éclipse, au sommet de la Saulire, avant de se terminer au fond de la vallée, à Courchevel-Le-Praz, témoignant de décennies d'ingénierie des pistes et d'enneigement artificiel. Depuis la mise en service du lac de l'Ariondaz en 2007, la station déploie jusqu'à 617 canons à neige pour couvrir 43 % de son domaine, atténuant ainsi les variations saisonnières. La Fédération Française des Stations de Montagne indique qu'à son apogée au début des années 1970, le domaine comptait quelque 28 000 lits touristiques ; aujourd'hui, les Trois Vallées offrent collectivement plus de 126 000 lits, dont Courchevel environ 32 000.

Le patrimoine architectural demeure un élément déterminant de l'identité de Courchevel. Les bâtiments de style chalet conçus par Denys Pradelle et Chappis à Courchevel en 1850 – Lang, Joliot-Curie, Petit Navire et d'autres – ont été inscrits au titre des monuments historiques entre 2005 et 2012, chacun illustrant la fusion, au milieu du XXe siècle, de la simplicité moderniste et du style vernaculaire alpin. La chapelle Notre-Dame de l'Assomption, achevée en 1959 et agrandie en 1970, figure parmi les trente sites protégés disséminés sur la commune. Cette reconnaissance confirme la vision des premiers urbanistes : une station non seulement implantée à flanc de montagne, mais harmonisant architecture et paysage.

L'accès, tant physique qu'administratif, reflète le développement progressif de Courchevel. Bien que la commune de Courchevel ait été créée en 2017 par la fusion de Saint-Bon-Tarentaise et de La Perrière, son hôtel de ville est resté à Saint-Bon, préservant ainsi la continuité avec l'époque pré-station. Les liaisons routières s'étendent du Praz à Méribel via le col de la Loze, en passant par La Tania, et de la Saulire à la vallée des Allues, permettant aux skieurs de traverser Paradiski et l'Espace Killy avec un forfait hebdomadaire. Les projets d'interconnexion de tous les systèmes de Tarentaise ont été stoppés par la création du Parc national de la Vanoise en 1963, préservant ainsi l'écologie alpine malgré l'essor du tourisme.

La gouvernance de la station allie gestion publique et entreprise commerciale. Courchevel Tourisme, office de tourisme structuré en EPIC et financé par les impôts locaux, a alloué un budget de 5,3 millions d'euros en 2015 à la promotion et à l'animation. Parallèlement, S3V, initialement financée par le Conseil général de la Savoie, gère les remontées mécaniques et les pistes en tant que société d'économie mixte dont les principaux actionnaires sont le Conseil départemental, les communes de Saint-Bon-Tarentaise, des Allues et de La Perrière, ainsi que les salariés de S3V. En 2008, S3V exploitait 85 remontées mécaniques dans les Trois Vallées, signe supplémentaire du rôle de Courchevel dans un réseau dont la superficie totale dépasse 2 100 hectares.

Malgré son palmarès et ses ressources, Courchevel est confrontée à l'impératif de modernisation. Ces dernières décennies, les télésièges débrayables de Poma ont remplacé les télésièges traditionnels, et le téléphérique du Grand Jour, autrefois le plus grand du monde, a cédé la place à des installations plus rapides et de plus grande capacité. L'enneigement artificiel reste énergivore, une préoccupation relevée par la Cour des comptes en 2011, qui a comptabilisé un coût annuel de 5 millions d'euros pour 130 000 m³ de neige produite. Face à l'évolution des tendances climatiques, la station équilibre la gestion des réservoirs et l'orientation des pistes afin de préserver des conditions fiables pour les événements d'élite comme pour les skieurs amateurs.

L'expansion de Courchevel vers la culture et le sport au-delà de l'hiver s'inscrit dans cette continuité d'adaptation. Le Festival International d'Art Pyrotechnique attire les spectateurs à Courchevel 1850 chaque été depuis 2003, tandis que des expositions d'art contemporain animent les galeries du village. Les sentiers de VTT et de randonnée, bien que moins fréquentés que ceux des stations voisines de Méribel et des Arcs, invitent à l'exploration de plateaux boisés et de vallées glaciaires. Un parcours de golf neuf trous au Jardin Alpin allie panoramas alpins et fairways, un clin d'œil aux loisirs toute l'année. Le jumelage avec Park City, dans l'Utah, souligne l'expertise commune en matière de tourisme de montagne et a même permis à Courchevel de bénéficier d'une piste rouge baptisée « Park City ».

Depuis sept décennies, Courchevel a conservé une double identité : un creuset d'innovation architecturale et un bastion de l'hôtellerie haut de gamme, tout en préservant le rythme de vie alpin dans ses hameaux plus calmes. Ses pentes, autrefois cartographiées par Chappis en temps de guerre, accueillent aujourd'hui des championnats du monde, et ses sentiers, autrefois dépourvus d'hôtels, canalisent désormais la richesse mondiale. Pourtant, derrière les façades de palaces et de boutiques de créateurs se cachent la persistance de petits villages, le vrombissement des remontées mécaniques et la gestion rigoureuse du territoire naturel qui a défini à la fois l'origine et le potentiel de la station. À une époque où les destinations de montagne sont confrontées à des pressions environnementales, économiques et sociales, Courchevel demeure un témoignage d'une planification réfléchie, d'une ambition architecturale et du charme intemporel de ses sommets enneigés. Son histoire, toujours en cours, allie exclusivité et communauté, spectacle et sérénité, innovation et respect du territoire – une odyssée alpine guidée par une vision réfléchie et l'effort humain.