Le long de la côte croate, de l'Istrie à la Dalmatie, « na buzaru » désigne une manière bien particulière de préparer les fruits de mer avec respect : une poêle peu profonde, une bonne huile d'olive, beaucoup d'ail, un trait de vin, des herbes fraîches et une poignée de chapelure qui absorbe le jus. Cette technique s'applique aux moules, aux langoustines et au homard, mais les palourdes préparées de cette façon évoquent particulièrement la mer, avec une douceur iodée qui contraste avec la sauce chaude et parfumée.
Le terme « buzara » désigne davantage une méthode de cuisson qu'une recette fixe. Les cuisiniers de l'Adriatique distinguent souvent deux grandes familles : une version « blanche » à base d'huile d'olive, d'ail, de vin blanc, de persil et de chapelure, et une version « rouge » où l'on ajoute oignon et tomate, ce qui donne au liquide une saveur plus riche et légèrement plus profonde. Dans les foyers et les konobas où les palourdes abondent, la version blanche prédomine généralement, car elle met en valeur la saveur délicate des coquillages.
Les palourdes na Buzaru s'inscrivent pleinement dans cette tradition. Les palourdes vivantes s'ouvrent dans un bain de vin aillé, libérant leur jus dans la poêle. Le liquide s'épaissit légèrement grâce à la chapelure et une douce réduction, formant un bouillon brillant qui enrobe chaque coquille. L'arôme est dominé par l'ail et le persil ; le goût offre un agréable équilibre entre la salinité des palourdes, la douce acidité du vin et l'onctuosité de l'huile d'olive. La méthode est simple, mais la maîtrise du temps et de la chaleur est essentielle, car les palourdes deviennent caoutchouteuses si elles cuisent trop longtemps sur le feu.
Sur la côte, ce type de buzara est souvent servi en entrée à partager, dans une grande marmite ou une poêle profonde que l'on passe directement du feu à la table. Un bol de pain grillé ou croustillant est disposé à côté, prêt à saucer, et un vin blanc local – Malvasia, Pošip ou Graševina – s'accorde avec l'acidité de la sauce. Dans certaines familles, le plat est proposé comme plat principal léger, accompagné d'une simple salade ou de pommes de terre bouillies.
Cette version de Clams na Buzaru conserve la structure d'un buzara blanc classique, tout en y intégrant quelques petites modifications issues de notre cuisine d'essai. La proportion de vin par rapport au jus de palourdes est suffisamment élevée pour obtenir un bouillon généreux, sans en diluer la saveur. L'ail cuit juste le temps nécessaire pour l'attendrir et parfumer l'huile, sans brunir, ce qui rendrait la sauce âpre. Une quantité maîtrisée de chapelure épaissit le liquide et lui confère une texture soyeuse et onctueuse, idéale pour napper une cuillère, plutôt qu'une pâte épaisse. Une noisette de beurre en fin de cuisson est facultative ; elle apporte une touche finale gourmande à la sauce pour ceux qui la préfèrent plus riche.
D'un point de vue pratique, ce plat convient aussi bien aux repas décontractés qu'aux occasions plus formelles. La cuisson active est rapide, ce qui permet aux palourdes de mijoter pendant que vos invités s'installent à table. La recette s'adapte facilement aux grandes tablées ; une grande casserole et un feu plus puissant permettent de doubler les quantités sans problème. Pour les personnes ayant des restrictions alimentaires, la base est naturellement sans produits laitiers si l'on omet le beurre. Des variantes sans gluten sont également possibles avec de la chapelure adaptée ou en les omettant complètement et en prolongeant légèrement la réduction du bouillon.
À bien des égards, les palourdes à Buzaru incarnent l'essence même de la cuisine côtière croate : une simplicité apparente, une base d'ingrédients d'exception et une exigence subtile quant au timing, à la température et à l'assaisonnement. Cuisinées avec soin, elles offrent un plat de fruits de mer à la fois rustique et raffiné : des palourdes au goût iodé, baignant dans un bouillon si savoureux qu'on a envie d'en savourer chaque bouchée, même une fois les coquilles vides.